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Faute inexcusable d'un particulier employeur

 

Dans un arrêt du 8 avril 2021 (pourvoi n°20-11935), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation s'est prononcée pour la première fois sur la faute inexcusable d'un particulier employeur.

Une employée de maison est devenue paraplégique à la suite d'une chute d'un balcon de son employeur. Les juges du fond ont retenu que l'accident du travail dont a été victime la salariée a pour cause la faute inexcusable du particulier employeur.

La question posée à la Cour de cassation est de savoir si la faute inexcusable du particulier employeur de personnel de maison doit être définie dans les mêmes termes que celle commise par l'employeur professionnel ou si elle obéit, au contraire, à une définition autonome.

La Cour de cassation retient le même critère d'appréciation de la faute inexcusable pour le particulier employeur que pour l'employeur professionnel en se référant à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé.

Le manquement à l'obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l'employeur est tenu à l'égard de l'employé a le caractère d'une faute inexcusable lorsque cet employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis son employé et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Le décès d'un salarié survenu au lieu et au temps de travail est un accident du travail jusqu’à preuve du contraire


Dans un arrêt du 11 juillet 2019 (pourvoi n°18-19160), la 2e chambre civile de la Cour de cassation affirme que « l'accident survenu au temps et au lieu du travail est présumé être un accident du travail, sauf à établir que la lésion a une cause totalement étrangère au travail ».

L'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale dispose : « Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. »

En l'occurrence, un salarié est décédé le 28 novembre 2014 des suites d'un malaise cardiaque ayant eu lieu au cours d'une réunion se tenant sur son lieu de travail et pendant son temps de travail, le jour même.
L'employeur a souscrit une déclaration d'accident du travail.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) a refusé de prendre en charge le décès de la victime au titre de la législation professionnelle, suite à une enquête administrative qui « a permis de faire apparaître que [le salarié] était de nature inquiète et qu'il était préoccupé par l'état de santé de son père ainsi que par la perspective d'un redressement fiscal analogue à celui dont avaient fait l'objet plusieurs de ses collègues ».

Le médecin conseil et le médecin expert ont écarté le caractère professionnel de l'accident.
Pour écarter tout lien de causalité entre le travail et l'accident, le médecin-expert a considéré qu'il n'existait pas de relation de causalité entre les conditions de travail et le décès : « Je ne pense pas que l'on puisse considérer qu'une réunion mensuelle d'un comité de direction où il ne devait pas y avoir de sujet particulièrement conflictuel à aborder puisse être responsable de stress inhabituel chez un cadre dirigeant ».

Les ayants droit du salarié ont saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

La cour d'appel a approuvé la décision de la CPAM, aux motifs notamment que « l'ambiance est qualifiée de très bonne, la victime étant décrite comme un homme très engagé professionnellement, très équilibré, chaleureux et souriant, à l'opposé d'une personne stressée ; que la réunion à laquelle la victime devait participer, qui avait à peine commencé, ne présentait aucune difficulté particulière, d'autant moins que les résultats devant y être présentés étaient bons et que rien ne permettait d'envisager que la victime puisse être mise, d'une façon ou d'une autre, en difficulté ; que les relations de la victime avec son nouveau supérieur, arrivé au mois d'août, étaient très constructives et le dialogue très ouvert, le management de ce dernier étant plus en adéquation avec la philosophie de la victime ».

L'arrêt de la cour d'appel est censuré par la Cour de cassation au visa de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale.

Instruction des déclarations d'accidents du travail et de maladies professionnelles du régime général


Le décret n°2019-356 du 23 avril 2019 relatif à la procédure d'instruction des déclarations d'accidents du travail et de maladies professionnelles du régime général refond la procédure de reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles, qui soumet le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle et son employeur à une instruction diligentée par l'Assurance maladie risques professionnels.

Ce décret renforce l'information des parties sur les différentes étapes de l'instruction et aménage une phase de consultation et d'enrichissement du dossier.


Pour les accidents du travail :
La déclaration de l'accident à laquelle la victime d'un accident du travail est tenue doit être effectuée dans la journée où l'accident s'est produit ou au plus tard dans les 24 heures.
Elle doit être envoyée, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, et non plus uniquement par lettre recommandée avec avis de réception.

Lorsque la déclaration de l'accident émane de l'employeur, celui-ci dispose d'un délai de 10 jours francs à compter de la date à laquelle il l'a effectué pour émettre des réserves motivées auprès de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM).

La CPAM dispose d'un délai de 30 jours à compter de la date à laquelle elle reçoit la déclaration d'accident pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident, soit engager des investigations.

Le délai d'instruction en cas de réserves motivées de l'employeur - et, par suite, d'investigations complémentaires conduites par la caisse - demeure fixé à 3 mois.


Pour les maladies professionnelles :
Le décret distingue deux procédures assorties d'un délai de 4 mois, selon que la demande relève du dispositif des tableaux de maladies professionnelles ou de la voie complémentaire faisant intervenir les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).

La CPAM engage des investigations et, dans ce cadre, elle adresse, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, un questionnaire à la victime ou à ses représentants ainsi qu'à l'employeur auquel la décision est susceptible de faire grief.
Le questionnaire est retourné dans un délai de 30 jours francs à compter de sa date de réception.
La CPAM peut en outre recourir à une enquête complémentaire.


Ces nouvelles procédures s'appliqueront aux accidents du travail et aux maladies professionnelles déclarés à compter du 1er décembre 2019.

Obligation de se soigner pour le sportif professionnel victime d'un accident du travail


Dans un arrêt du 20 février 2019 (pourvoi n°17-18912), la chambre sociale de la Cour de cassation illustre les manquements à l'obligation de loyauté d'un sportif salarié placé en arrêt de travail.

Pendant la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l'employeur peut seulement, dans le cas d'une rupture pour faute grave, reprocher au salarié des manquements à l'obligation de loyauté.

En l'occurrence, un basketteur professionnel a été licencié pour faute grave, alors qu'il est en arrêt de travail à la suite d'un accident du travail constitué par une blessure des muscles abdominaux.

L'employeur lui reprochait de ne pas s'être présenté aux séances de kinésithérapie organisées par l'équipe médicale et nécessaires au rétablissement de sa condition physique.
En effet, l'article 8 du contrat de travail stipulait : « le joueur devra soigner sa condition physique pour obtenir le meilleur rendement possible dans son activité. Il devra respecter strictement les instructions de tout membre de l'encadrement technique et du président du Club ».

La cour d'appel, approuvée par la Cour de cassation, a estimé que « la spécificité du métier de sportif professionnel obligeait le salarié, en cas de blessure, à se prêter aux soins nécessaires à la restauration de son potentiel physique ».
Dès lors, le fait de ne pas se présenter aux séances de kinésithérapie prescrites par le médecin traitant de l'équipe constituait un manquement à l'obligation de loyauté rendant impossible la poursuite du contrat de travail.

Inaptitude consécutive à un manquement de l'employeur : juridiction compétente


Dans deux arrêts du 3 mai 2018 (pourvois n°16-26306 et n°16-26850), la chambre sociale de la Cour de cassation définit précisément la compétence et l'office du juge prud'homal pour l'appréciation et l'indemnisation des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité.

Si l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail, qu'il soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale, le conseil de prud'hommes est seul compétent pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu'il est démontré que l'inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée.

Même s'ils sont intrinsèquement liés à l'exécution du contrat de travail, l'appréciation et l'indemnisation des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité en application de l'article L. 4121-1 du Code du travail ne relèvent pas nécessairement de la compétence de la juridiction prud'homale.

Dès lors, le salarié ne peut former devant la juridiction prud'homale une action en dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité pour obtenir l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.

La Cour de cassation décide, en premier lieu, que si l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail, qu'il soit ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale, la juridiction prud'homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En second lieu, la Cour de cassation affirme qu'est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu'il est démontré que l'inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée. En effet, le licenciement, même s'il est fondé une inaptitude régulièrement constatée par le médecin du travail, trouve en réalité sa cause véritable dans ce manquement de l'employeur.

Si cette solution n'est pas nouvelle, elle est désormais affirmée avec netteté par la chambre sociale de la Cour de cassation et doit être reliée au principe selon lequel il incombe aux juges du fond de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement.